Région du Centre-Nord

 « Pour avoir suspendu les émissions de la radio à 19h 50 mn de la veille à cause de la pluie qui menaçait, je suis revenu très tôt ce matin aux environs de 6h pour préparer sa réouverture prévue pour 9h. A ma grande surprise, j’ai constaté que le bâtiment abritant les studios et les bureaux de la radio était en fumée. Tout en me demandant ce qui a pu occasionner cet incendie, j’ai appelé le nom du gardien pour vérifier sa présence. C’est en ce moment que j’ai entendu une voix venant du petit local abritant l’émetteur et les installations énergétiques de la radio. Je me suis donc approché et j’ai découvert que la porte avait été scellée avec un fer mou. Lorsque j’ai ouvert la porte, j’ai trouvé notre gardien François Sawadogo grièvement blessé à la tête à l’aide de bâtons et couché dans du sang. Il avait même perdu connaissance et répétait ‘‘Wendata n’est pas là’’. J’ai immédiatement informé le CSPS qui a dépêché l’ambulancier pour l’évacuer ainsi que la police de Pissila et mon PDG... » C’est en ces termes que Wendata Ouédraogo, journaliste-chef de programme de la radio Manegmoogo de Pissila et premier témoin de l’évènement, nous a relaté les faits.

Sur les lieux, les dégâts parlent d’eux-mêmes, preuve que le ou les auteurs de cet acte qu’on peut qualifier de criminels avaient pour mission de faire taire cet outil de communication qui faisait pourtant la fierté de milliers d’auditeurs de la région du Centre-Nord et ses environs.

La tristesse se lisait sur les visages des personnes qui ont effectué le déplacement sur le site de la radio situé à l’entrée de la ville de Pissila, sur la route nationale n°3 Kaya – Dori, en cette matinée du 25 août afin de constater de visu l’ampleur des dégâts. A en croire le président des auditeurs de la radio, Balnaba Paniteckba de Karka, cet incendie est vécu comme un grand deuil pour les habitants de la localité en ce sens que cette maison était considérée pour eux comme une bibliothèque.

‘‘La radio nous informait, formait, sensibilisait, éduquait, conscientisait et nous rapprochait de l’administration et des populations d’autres localités du pays et même de l’extérieur …’’, a-t-il indiqué.

Quels peuvent être les motifs réels de cet acte criminel ?                                                                 

Pour le PDG de la radio et par ailleurs président de l’Association Manegmoogo d’Appui aux Initiatives de Développement, promotrice de cet outil de communication, c’est le second acte criminel perpétré contre cette presse audio depuis son ouverture en 2011.

‘‘En mai 2011, alors que j’étais maire de Pissila, un groupe de jeunes qui manifestaient contre ma présence à la tête du conseil municipal avait incendié des infrastructures sur le site de la radio en plus de mon domicile et du véhicule de la mairie. L’affaire avait été portée en son temps devant la justice qui avait condamné les auteurs, mais ces derniers n’ont jamais purgé leur peine. A la fin de mon mandat de maire, j’ai par la suite été élu conseiller municipal et régional. Présentement, j’ai quitté le CDP pour rejoindre l’UPC où je suis un simple militant’’, a – t – il expliqué. Le PDG de radio Manegmoogo n’a pas aussi manqué de rappeler qu’en 2011, un de ses journalistes avait reçu des menaces de mort d’un groupe de jeunes de la localité pour avoir lu un communiqué de la mairie.

L’association Manegmoogo envisage-t-elle délocaliser la radio ?

Le président de la structure qui dit craindre pour la sécurité de ses agents, confie que cette question sera débattue en concertation avec le CSC et les partenaires de la radio. Il espère que l’enquête de la Sécurité et de la Justice permettra d’élucider cette affaire. Un constat a été effectué par la police en présence du préfet-président de la délégation spéciale de Pissila.

Il est à noter qu’en raison de l’absence d’électricité à Pissila, la radio Manegmoogo fonctionnait, à son ouverture en 2011, grâce à des groupes électrogènes. Mais depuis 2013, elle émettait à base d’énergie solaire produite par des équipements acquis grâce aux contributions de ses auditeurs. Deux nouvelles plaques solaires d’une valeur de 600 000 francs CFA, récemment acquises grâce aux cotisations des auditeurs et présentées à ces derniers le samedi 22 août à l’issue d’une cérémonie de reboisement sur le site de la radio, n’ont pas été épargnées par l’incendie.

L'observateur Paalga