Inhumation des martyrs de l’insurrection populaire : véritable devoir de mémoire, ultime « Adieu ! » de toute une Patrie !
« Les morts des 30 et 31 octobre ne sont pas morts ; ils sont parmi nous, ils nous ont transmis un héritage. Ils sont morts pour que nous fassions de notre Burkina Faso, une harpe de paix où règnent la cohésion sociale, la liberté, la solidarité, le vivre ensemble harmonieux, le dialogue et la tolérance entre tous les filles et fils de ce pays, toutes les ethnies, toutes les religions. Civiles ou militaires, main dans la main, nous leur devons donc cela. Du haut de cette tribune, vêtu de cette tenue que nous militaires appelons ‘’terre du Burkina’’, je vous demande, civils, militaires, Burkinabè de tous horizons et de toutes confessions, tenez-vous la main et observons en leur mémoire, 5 minutes de silence débout ». Ces propos du capitaine Hervé Yé, dans un ton et un rythme qui épousent l’émotion ressentie par chaque Burkinabè, résument bien cette journée de recueillements, de prières et d’inhumation des martyrs de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre dernier. C’est une foule impressionnante, composée de toutes les couches sociales, avec une présence très remarquée des élèves, qui a suivi les différentes étapes qui ont jalonné ces moments forts. De la maison du Peuple où avaient « pris place » les dépouilles mortelles à la « Place de la Révolution », lieu des recueillements et prières avant l’inhumation. Seul ou par groupes, les populations arrivent, certains, les poings levés, en signe de combattivité et de victoire. La devise ne trouve pas meilleur cadre d’expression que celui qui réunit en cette journée : « La Patrie ou la mort, nous vaincrons ! ». Autorités coutumières, religieuses, politiques, militaires et paramilitaires, membres du gouvernement et présidents d’institution, leaders de société civile, citoyens anonymes, avec à leur tête, le Président du Faso et le Premier ministre, arrivés respectivement à 9 h 00 et à 8h55 ; tous étaient-là, mobilisés pour rendre un hommage aux martyrs.
Un corps, jusque-là, non identifié
A 9h 25, tous se mettent débout pour accueillir l’entrée des dépouilles mortelles à la « Place de la Révolution ». L’émotion est encore plus forte. Certains ne peuvent s’empêcher de pousser des cris de ‘’douleurs’’, des pleurs tandis que d’autres s’efforcent de contenir leurs larmes qui inondent le visage. Le drapeau national couvre chaque cercueil, porté tous ensemble par le porte-chars du génie militaire. Eux ? Ce sont les martyrs de l’insurrection. « Ces personnes qui n’ont pas hésité à défendre leurs idéaux d’un Burkina nouveau. Un jour nouveau se lève donc au Burkina Faso et cela a été rendu possible grâce au sacrifice suprême de 24 personnes que la nation pleure ce jour. Ces martyrs viennent des quatre (4) coins du Burkina. Ils ont laissé leur vie pour que le peuple burkinabè soit cité en exemple à travers le monde », peut-on noter.
Six(6) des vingt-quatre (24) victimes ont été inhumées « ce jour, désormais historique ». Le 7ème corps n’a, jusque-là, pas été identifié. Les autres ayant déjà été enterrées par leur famille. La Prière œcuménique dure de 9h 45 à 10h10. Les leaders des confessions religieuses (Catholique, Musulmane et Protestante) se tiennent ensemble pour, tour à tour, livrer des « messages saints » en la mémoire des victimes.
Brève aperçue des victimes inhumées :
KARAMBIRI Gaston, né le 31 décembre 1979, décédé le 30 octobre 2014,
OUOBA Yempabou Fabrice Aristide, né le 2 septembre 1983, décédé le 30 octobre 2014,
BERE Inoussa, né le 11 novembre 1992, décédé le 30 octobre 2014,
BELEM Abdoul Moubarak, né le 6 janvier 1996, décédé le 2 novembre 2014,
SAMA Issa, né le 6 octobre 1997, décédé le 30 octobre 2014,
le 7ème corps n’a toujours pas été identifié
Une pensée pour les blessés !
Les représentants religieux ont invité les Burkinabè à accueillir la mort de ces jeunes comme une semence qui portera fruit pour le Burkina : fruit du pardon, de la justice, la réconciliation, du partage, etc. Ils invitent chaque Burkinabè aux valeurs d’humilité et de crainte de Dieu. « Dieu unisse les cœurs, les filles et fils du Burkina Faso ! », ont-ils prié.
Le représentant des familles des victimes, tout en mesurant le vide que laisse chaque victime dans sa famille, est consolé de savoir qu’elles ont donné leur vie pour défendre des valeurs de l’intégrité, de l’honneur, de justice, de liberté, de démocratie. « Nous sommes, à jamais, fiers de vous car, vous avez contribué à écrire une haute page de l’histoire du Burkina. Nous ne vous oublierons jamais. Les générations à venir ne vous oublieront jamais. Vous n’êtes pas morts pour rien. C’est pourquoi, nous ne cesserons d’implorer le Seigneur, afin qu’il vous ouvre les portes du Paradis pour que vous reposez en paix », a-t-il prié. Il a par ailleurs eu une pensée pour l’ensemble des blessés de l’insurrection, à qui il a souhaité un prompt rétablissement.
Cette étape s’avère à 10h20 avec le passage du Président du Faso, Michel Kafando et du Premier ministre, Isaac Yacouba Zida pour s’incliner devant les corps. Le cortège emprunte ensuite la direction du cimetière municipal de Gounghin sis au secteur N°6 dans le 6ème Arrondissement de Ouagadougou. La foule est toujours immense, devise et hymne national en chœurs, à braver le soleil de plomb pour consommer la distance qui sépare la Place de la Révolution au cimetière (environ 4 km) où elle est arrivée autour de 11h45. S’en suivent la bénédiction des tombes par les leaders religieux, l’oraison funèbre, lue par le ministre de la communication, porte-parole du gouvernement et chargé des relations avec le CNT (Conseil national de la transition), Frédéric Nikiéma et les honneurs militaires. Les propos des uns et des autres, l’expression de visage des parents et proches des victimes, sont lourds d’émotions et de tristesse. Sans nul doute liées aux dernières images de ces martyrs aux portes de leur dernière demeure. Difficile à supporter ! Surtout, lorsqu’à 12h20, les cercueils effectuent, avec la plus grande attention, la descente sans retour de l’intérieur de la tombe. Synonyme de l’ultime « ADIEU ! ». C’est, désormais, le repos éternel !
Lefaso.net
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