Education de base au Burkina : Entre déscolarisation et refonte
Face à la Représentation nationale le 06 décembre 2013, la ministre en charge de l’Education nationale, Koumba Boly a fait état de l’impact de l’orpaillage traditionnel sur la scolarité des élèves. L’occasion a également été celle pour la ministre Boly de magnifier l’importance du transfert du préscolaire et du post-primaire au MENA (ministère de l’Education nationale et l’alphabétisation).
L’interpellation du gouvernement fait partie des missions constitutionnelles de la Représentation nationale. Elle est en effet, prévue avec le vote de la loi et le consentement à l’impôt, à l’article 84 de notre Loi fondamentale. C’est dans ce cadre que le député Rasmané Ouédraogo a soumis à la ministre en charge de l’Education nationale, Koumba Boly, une question orale sans débat. En effet, après avoir relevé que « le travail des enfants et surtout la déscolarisation ou l’abandon des classes par les élèves » constituent des effets pervers de l’exploitation artisanale de l’or, l’honorable a demandé à la ministre de « situer la représentation nationale sur l’ampleur du phénomène région par région et au plan national, ses causes profondes ou réelles, ses conséquences et les mesures déjà prises ou envisagées pour le Gouvernement pour y remédier ».
Et comme à toute question orale sans débat, Mme Boly a donné lecture de ses éléments de réponses. Il en ressort que le constat selon lequel les sites d’exploitation artisanale de l’or constituent des pôles d’attraction des couches sociales vulnérables, en l’occurrence les enfants, a suscité la réalisation en 2009, d’une étude sur les régions du Nord, du Sahel, du Plateau central, du Sud-ouest, et du Centre. Cette étude a permis, à en croire la ministre Boly, de recenser 600 sites mines artisanales exploitées par une population dont le tiers a moins de 18 ans, majoritairement élèves. Et dans les salles de classe, ce sont des fréquentations irrégulières, des retards fréquents, la manifestation de scènes de fatigue physique et intellectuelle, de somnolence, qui sont constatés. Autre constat, des élèves (filles) de 11-12 ans livrées à la prostitution, dont certaines en grossesse.
Ce sont des constats naturellement interpellateurs. Et la ministre de s’interroger, « Que devons-nous faire ? », « Que pouvons-nous faire ? ». Avant d’appeler la Représentation nationale et tout le monde à s’impliquer dans la recherche de solution, Koumba Boly a décliné les actions entreprises par le gouvernement et par son département en particulier. A ce titre, relève-t-elle, des séances de débat, de sensibilisation, et d’information sur la question, ont été menées. A celles-ci, s’ajoutent « des sorties gouvernementales dans les régions concernées ». Le ministère en charge de la sécurité a déployé, à en croire la ministre Boly, des agents chargés d’empêcher la fréquentation des sites par des enfants.
Au MENA, des mesures ont été prises pour améliorer les revenus des mères éducatrices. Cantines scolaires, et fournitures scolaires assurées. Mieux, « des contrats sociaux » avec les familles qui sont autour des mines en vue de les accompagner dans la scolarisation de leurs enfants, ont été signés. Aussi est-il envisagé l’organisation des orpailleurs en réseaux, afin de les impliquer dans la conduite des actions de sensibilisation.
En sus, et dans le cadre du processus de relecture du Code minier, le MENA a fait prendre en compte la question de la fréquentation des sites miniers par les enfants. C’est du moins, ce qu’a confié la ministre Koumba Boly pour qui l’autre axe de solutions se trouve dans la mise en œuvre du projet de transfert du préscolaire et du post-primaire au MENA.
Reforme sujette à rejet encore rigide
En effet, précise Mme Boly, « le transfert du préscolaire et du post-primaire au MENA va augmenter sensiblement l’offre d’éducation au niveau du post-primaire ; du même coup, la possibilité à de nombreux enfants de pouvoir poursuivre leur scolarité après le CEPE ». Avec cette réforme, l’éducation de base formelle comprend désormais l’éducation préscolaire (3-6 ans), l’enseignement primaire (6-12 ans) et l’enseignement post-primaire (12-16ans). Elle est surtout caractérisée non seulement par le fait qu’elle rend l’école obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans, mais aussi par l’extension de l’enseignement de base qui comprend désormais l’enseignement primaire et le premier cycle de l’actuel enseignement secondaire.
Et pour le directeur de la communication et de la presse ministérielle (DCPM) du MENA, Elie Zan, « le continuum, c’est pour améliorer la qualité de l’éducation dans notre pays ». En rappel, M. Zan situe le début de la réflexion autour dudit projet de réforme aux années 1994. Ces propos, Elie Zan les a tenues à l’occasion d’un forum tenu dans la matinée du jour même – 06 novembre 2013 - où la ministre Koumba Boly fait répondu à l’interpellation de l’Assemblée nationale.
Ce forum ayant eu pour thème « Mise en œuvre du continuum : rôle et place des professionnels des médias et de la communication » a enregistré la présence d’un représentant des syndicats d’enseignants jusque-là hostiles au projet. Il a été initié par le Réseau des journalistes et communicateurs pour l’éducation, l’eau, genre et développement au Burkina Faso (REJCEED/BF) et le Réseau d’initiatives de journalistes (RIJ).
L’occasion a été celle pour Abou Ouattara, coordonnateur du REJCEED de relever que « les journalistes devraient mieux s’informer pour pouvoir mieux accompagner les différents acteurs dans la conduite de cette politique de l’éducation ». C’est cela l’objectif dudit forum, a-t-il précisé. D’autres organisations de la société civile, en l’occurrence le Cadre de concertation des ONG et associations actives en Education de base au Burkina Faso (CCEB/BF), Light for the work ont aussi été présents.
Après avoir indiqué que la position de l’ensemble des syndicats de l’éducation est celle du rejet du continuum en l’état actuel, Nongdo Bembemba, responsable adjoint à la formation syndicale au bureau national de la F-SYNTER (Fédération des syndicats nationaux des travailleurs de l’éducation et de la recherche) précise que « Le transfert pose un certain nombre de problèmes. Il y a des problèmes d’ordre juridique et institutionnel, liés à la question de la ressource humaine, aux infrastructures ». Et d’ajouter, « Tous ces problèmes ne sont pas encore résolus ».
Selon lui, « pour consacrer l’effectivité du droit à l’éducation pour la majorité du peuple, en dehors des diktats des institutions et pays impérialistes, il faudrait un pouvoir véritablement soucieux des intérêts populaires, et qui prenne en compte » :
Le développement d’une école publique véritablement obligatoire et gratuite pour tous les enfants conformément aux aspirations de notre peuple ;
L’arrêt des Programmes d’Ajustement Structurel ;
L’allocation budgétaire suffisante au secteur de l’éducation ;
La restauration des bourses, internats etc. pour les enfants des pauvres ;
La construction des infrastructures scolaires et universitaires dignes du système éducatif et recrutement en nombre et en qualité de personnels du système éducatif ;
La gestion saine des ressources financières matérielles et humaines ;
La sanction des coupables d’actes attentatoires à la bonne tenue de l’éducation.
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