Aux ministères du commerce et de l’industrie : ‘’Le tabac tue toutes les six secondes’’
Donner aux conseillers juridiques de ministères en charge du commerce et de l’industrie de disposer de connaissances solides et inspiratrices en matière de lutte contre le tabagisme qui tue toutes les six secondes, c’est à cette fin qu’un atelier se tient à Ouagadougou au profit de 12 pays africains dont le nôtre. La cérémonie d’ouverture de cet atelier est intervenue ce mercredi 2 juillet 2014 sous la présidence du ministre burkinabè de la santé, représenté par son conseiller technique Bocar Kouyaté.
Le référentiel normatif – à l’échelle internationale - de la lutte contre le tabagisme se rapporte à la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac. Une convention ratifiée par le Burkina en juillet 2006 et dont le cadre de mise en œuvre au niveau national s’articule autour d’une loi de 2010 accompagnée de décrets d’application pris en 2011. Et depuis, des actions sont fréquemment entreprises – avec l’accompagnement du ministère de la santé - par des organisations de la société civiles décidées à contrer le tabagisme, une des principales causes évitables de décès.
Mais les avancées significatives dans l’obstruction de la voie à ce fléau se font encore attendre. Et dans de nombreux autres pays africains, la situation est des plus alarmantes. Au constat, les ministères en charge du commerce ne semblent pas s’investir véritablement dans la lutte antitabac ; sans doute parce qu’ils ne sont pas suffisamment outillés sur le contenu de la Convention cadre de l’OMS, une Convention assortie d’obligations précises à la charge des Etats qui l’ont ratifiée.
Des données alarmantes
En tout cas, le tabagisme continue de faire ravage. En effet, confie M. Kouyaté, le rapport de la première l’enquête STEPS de notre pays -une enquête réalisée en 2013 –révèle que la consommation du tabac demeure un réel problème de santé publique avec une prévalence de 19,8%. Cette prévalence reste plus élevée chez les hommes avec 29,2% que chez les femmes avec un taux de 11,8%. Les sujets jeunes de 25 à 34 ans de sexe masculin sont les plus touchés avec une prévalence de 32,6%. La prévalence de l’exposition passive à la fumée de tabac à domicile était de 36,3% chez les personnes âgées de 25 à 64 ans.
Et il est aussi établi que dans le monde, toutes les six secondes, quelqu’un, quelque part, meurt à cause du tabagisme. En 2011, la consommation de tabac a provoqué le décès d’environ 6 millions de personnes à travers le monde, parmi lesquelles 600 000 étaient des fumeurs passifs. 80 % de ces décès ont été observés dans les pays à revenus faibles ou moyens, en l’occurrence les pays africains.
La CCLAT au centre des échanges
Et si les décideurs politiques africains veulent gouverner des populations saines et productives, s’impose à eux la nécessité d’être véritablement et franchement engagés dans la lutte antitabac. Dans ce sens, les ministères en charge de la santé (généralement engagés avec promptitude), et les ministères en charge du commerce doivent faire preuve d’engagement conséquent et sincère. Et pour qu’il en soit ainsi, il y a lieu que les conseillers juridiques de nos ministres en charge du commerce soient suffisamment sensibilisés et outillés. D’où le présent atelier de Ouagadougou auquel sont représentés le Bénin, le Burundi, le Cameroun, la Côte d’ivoire, le Gabon, la Guinée Conakry, le Mali, le Niger, la République Démocratique du Congo, le Sénégal, le Tchad, le Togo et bien sûr, le Burkina Faso. Est aussi présente à cet atelier, une équipe de l’Union internationale contre la tuberculose et des maladies respiratoires. Un atelier constitutif de cadre d’échanges axés sur la Convention cadre de lutte antitabac (CCLAT) dont l’objectif, à tout le moins, est de réduire – en jouant sur la demande surtout du tabac - la prévalence du tabagisme. Il vise, à termes, à protéger les générations présentes et futures contre les effets sanitaires, sociaux, environnementaux et économiques dévastateurs découlant non seulement de la consommation du tabac, mais aussi de l’exposition à la fumée du tabac.
Et au cours de cet atelier, il s’agira, confie Dr Narcisse Naré, point focal de la lutte antitabac au Burkina Faso, de faire en sorte que les conseillers juridiques des ministères du commerce dans les pays représentés « s’approprient du contenu de cette convention ». Toute chose qui leur permettrait de consentir, eux aussi, des efforts pour « l’atteinte les objectifs d’amélioration de la santé des populations », objectifs chers aux acteurs de la lutte antitabac.
Le tabac ne doit plus être un produit qui divise…
Au niveau de l’Union internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires, l’on souhaite ardemment que cet atelier permette « de repartir sur de bonnes bases, de s’assurer que l’ensemble des gouvernements et notamment les ministères du commerce et de l’industrie comprennent désormais qu’ils ont obligations de protéger les consommateurs d’un produit qui tue la moitié de ses consommateurs réguliers ». C’est ce qu’a laissé entendre le représentant de l’Union, Daouda Adam, qui a aussi martelé, « Le tabac ne doit plus être un produit qui divise les instances de protection des consommateurs ».Aussi a-t-il lancé à l’endroit des participants, « L’Union et ses partenaires vous assurent de leur disponibilité à accompagner les gouvernements des pays francophones pour que les décisions courageuses de santé publique prises au niveau international par vos gouvernements soient mises en œuvre pour protéger les populations/consommateurs contre l’épidémie du tabagisme ».
L’atelier des grandes attentes
Le représentant du ministre de la santé a, pour sa part, émis le souhait que les participants maitrisent au mieux, le contenu de la CCLAT, qu’ils soient à même de connaître, de comprendre et de réfuter « les arguments fallacieux de l’industrie du tabac pour bloquer les avancées de l’application de la Convention ». A tout le moins, qu’ils soient « mieux équipés et plus enclins » à soutenir les décideurs politiques dans le sens de l’élaboration de cadres normatifs galvanisants au profit de tous les acteurs de la lutte antitabac. Il est donc attendu de ces juristes, d’être désormais assez percutants dans leurs conseils à l’attention des ministres en charge du commerce et de l’industrie, en vue de faire prévaloir le souci de préservation de la santé des populations sur les objectifs mercantiles d’ailleurs largement profitables aux industries du tabac.
Et du côté de l’ONG Afrique contre le tabac (ACONTA), l’on se veut plus explicite et direct en nourrissant également l’espoir que cet atelier de 48 heures, offre aux conseillers juridiques de disposer de connaissances à même de les inspirer dans leurs conseils à l’attention des ministres en charge du commerce, afin que ceux-ci ne s’affichent plus en acteurs hostiles à la mise en œuvre effective de la CCLAT. Au contraire, qu’ils fassent preuve d’activisme franc dans la lutte antitabac. C’est du moins, ce qu’a confié SalifNikiéma, Secrétaire exécutif de l’ONG ACONTA.
Lefaso.net
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